Les caractéristiques de la guerre de 1914 - 1918

 
Les surprises de 1914
 
La guerre de 1914 - 1918 survient après une période marquée par des progrès considérables dans les domaines de la science, de l'industrie et par conséquent de l'armement. La lutte va donc présenter une forme nouvelle qui sera une surprise pour tous les belligérants.
 
Les progrès de l'armement du début du XXe siècle (artillerie à tir rapide et mitrailleuse) entraînent un développement de la puissance du feu dont nul ne soupçonne ni l'ampleur ni surtout les conséquences. Quand l'infanterie, décimée par le feu, renonce au mouvement, s'enterre et ressuscite la guerre de position, elle trouve là une parade imprévue que les moyens matériels existants ne permettent pas de déjouer.
 
C'est ce déséquilibre inattendu entre les possibilités de la défense et les moyens de l'attaque qui est la caractéristique essentielle de la plus grande partie de la guerre.
 
 
La durée de la guerre
 
En 1914, rares sont ceux qui pensent que la guerre puisse être longue. Les arguments de ceux qui prédisent une guerre courte semblent logiques. "Les armées que nous mettrons en œuvre, avait dit Poch, seront des armées de civils arrachés à leurs familles. La guerre apportera le gêne avec elle. La vie cessera, d'où la conséquence que la guerre ne pourra durer longtemps".
 
En Allemagne l'opinion est la même. Dans une série d'articles retentissants parus en 1909, von Schlieffen, chef d'Etat-Major jusqu'en 1906, limite la durée de la guerre à celle de la première bataille. Il met en avant des arguments économiques et sociaux "Dès le début d'une guerre malheureuse, écrit-il, le gouvernement du pays devra compter avec un courant d'opinion qui le conduira à la paix". La plupart des hommes politiques, des financiers, des économistes sont eux aussi convaincus que la guerre serait courte.
 
Les événements semblent leur donner raison, et il s'en faut de peu que l'Allemagne n'arrache la victoire après quelques mois de campagne. Mais sa tentative échoue et les fronts fortifiés font leur apparition, fronts qu'aucun des belligérants n'ont les moyens de percer au début du conflit. Dès lors aucune décision rapide ne peut être obtenue avant la fabrication d'un matériel considérable. Contrairement à toute attente les peuples supportent les souffrances d'une lutte de quatre années.
 
Durant ces quatre années il y a certes des périodes de calme relatif, mais, dans l'ensemble, les combats sont ininterrompus. Comparée aux guerres antérieures au cours desquelles les armées ne s'affrontent que dans quelques campagnes séparées dans le temps et relativement brèves, la guerre de 1914 - 1918 est par sa durée et sa continuité un phénomène nouveau.
 
 
La guerre du matériel
 
La guerre de 1914 - 1918 est souvent qualifiée de "guerre de matériel", voulant ainsi marquer que le matériel y joue un rôle infiniment plus important que dans les conflits antérieurs. Jusqu'alors, pour établir la balance des forces en présence, l'on pouvait se contenter de comparer les effectifs et les moyens de combat en service au début des opérations. La puissance industrielle des belligérants ne jouait au cours du conflit qu'un rôle secondaire. L'entretien du matériel et le renouvellement des stocks de munitions pouvaient être assurés par quelques établissements spécialisés.
 
En 1914, dès les premières semaines du conflit, il apparait que les consommations de munitions du nouvel armement dépassent de loin toutes les prévisions. La fabrication des munitions nécessaires dépasse les possibilités des établissements spécialisés. D'autre part, la guerre exige un accroissement considérable des matériels existants et la mise en service de matériels entièrement nouveaux.

Il apparait enfin que pour certains matériels modernes tels que les chars ou les avions, le rythme du progrès est plus rapide que le rythme de la production industrielle, si bien qu'une arme est démodée dès sa sortie d'usine. Il est impossible de prévoir un terme à l'effort industriel.
 
Pour rattraper leurs retards et pour maintenir leurs instruments de combat au niveau des progrès techniques, tous les belligérants doivent mobiliser leur industrie. La proportion des effectifs non combattants par rapport aux effectifs combattants s'accroit sans cesse. Les industries adverses entament une lutte dont les répercussions sur les opérations militaires sont plus profondes et plus immédiates qu'elles ne l'avaient jamais été dans le passé.
 
 
La guerre du personnel
 
Les belligérants mettent sur pied des armées qui par leurs effectifs sont sans commune mesure avec celles des guerres précédentes. De 1914 à 1918 la France mobilise 7.935.000 hommes, l'Angleterre 5.704.000, la Russie 15.070.000, l'Allemagne 13.250.000 et l'Autriche 9.000.000. Au total dans le monde entier 67 millions d'hommes sont arrachés à leurs foyers.
 
La France et l'Allemagne en particulier jetteront dans la bataille la totalité de leurs disponibilités humaines. La guerre de 1914 - 1918 est la première des guerres totales. Sur les théâtres d'opérations relativement exigus de l'Europe occidentale, la mise en ligne de ces énormes armées ne sera pas sans influencer la stratégie de la guerre, avec la création des fronts continus et l'impossibilité de manœuvrer les ailes de l'adversaire. L'avantage est longtemps donné à la défensive.
 
 
L'universalité de la guerre
 
1914 - 1918 est la première des guerres mondiales. L'interdépendance des intérêts politiques et économiques dans le monde entier (interdépendance due au développement des moyens de communication) amènera, la longueur de la guerre et entraînera la plupart des nations à prendre part au conflit.
 
Aux côtés de la France, de la Russie, de la Belgique, de l'Angleterre, de la Serbie et du Monténégro, vont successivement se ranger le Japon (15 août 1914), l'Italie (mai 1915), la Grèce (septembre 1915), le Portugal (1916), la Roumanie (août 1916) et les Etats-Unis d'Amérique (avril 1917). D'autres puissances déclareront la guerre à l'Allemagne mais sans prendre une part effective dans la lutte. Parmi elles, citons la Chine, le Siam, le Brésil, la Bolivie, l'Uruguay, l'Equateur, le Panama, le Nicaragua, le Honduras, le Guatemala et la Perse.
 
Le bloc des Empires Centraux, Allemagne et Autriche-Hongrie, ne sera renforcé que par la Turquie (Novembre 1914) et par la Bulgarie (Octobre 1915). Cette extension dans l'espace ne suffirait pas à caractériser une guerre dont la durée et la violence ont amené tous les belligérants à jeter progressivement dans la balance toutes leurs ressources, non seulement militaires mais industrielles, économiques et financières.
 
Cet appel à tous les domaines de l'activité donne à la guerre de 1914 - 1918 un caractère d'universalité et explique les profonds bouleversements économiques et sociaux qu'elle a causés dans le monde entier.
 
 
Les différentes phases de la guerre
 
Les opérations sur le front occidental de 1914 à 1918 peuvent être groupées en trois phases. Tout d'abord la guerre de mouvement, d'août à novembre 1914, suivie d'un front stabilisé entre novembre 1914 et mars 1918, puis de la reprise de la guerre de mouvement de mars à novembre 1918.
 
La première phase dure 3 mois. Elle est marquée par l'échec des plans opérationnels initiaux des deux adversaires. Echec du plan français après la bataille des frontières et échec du plan allemand après la bataille de la Marne.
 
La deuxième phase dure plus de 3 ans. Sur le théâtre d'opérations occidental, faute de moyens matériels appropriés, toutes les tentatives de rupture des fronts échouent. Ces échecs répétés entraînent une profonde évolution de l'armement, de l'organisation et de la tactique.
 
La troisième phase dure 8 mois. Le développement du matériel et les perfectionnements des méthodes de combat permettent des deux côtés d'obtenir la rupture des fronts défensifs. La supériorité croissante des Alliés en effectifs et en matériel leur assure finalement la victoire.


 

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